M. Cazeneuve, arrêtez les diversions, faites preuve de leadership - Main contents
Nous sommes tous horrifiés par les attentats d'hier à Bruxelles. La peur et l'inquiétude gagnent nos concitoyens et nous le comprenons. Ce dont nous avons besoin maintenant c'est de leadership, un leadership qui agisse dans le calme et le rassemblement. Pourtant, au lendemain de ces attaques sanglantes et terrifiantes, le gouvernement français reprend sa campagne cynique et mensongère sur le "PNR européen". Avec cette campagne, le gouvernement français nous fait miroiter une fausse sécurité, tandis que les problèmes réels et urgents ne sont pas combattus à leur juste mesure. Le gouvernement cherche à distraire du fait qu'il n'a même pas commencé à résoudre les racines du phénomène terroriste. C'est le théâtre des ombres.
Le gouvernement français répète à l'envie que le Parlement européen "bloque" le dossier de la Directive EU PNR (données des passagers aériens). En réalité le Parlement a finalisé le dossier au mois de décembre passé. Nous passerons au vote dès que le Conseil (i.e les gouvernements nationaux) aura finalisé le dossier concomitant, le Règlement sur la Protection des Données. Il n'y a pas de bloquage, c'est un mensonge.
Le gouvernement français dit que les députés de "gauche" (marrant ça, d'habitude en France les Libéraux sont considérés comme un parti à droite de Thatcher) refusent un "PNR européen". La vérité est que le groupe ADLE a proposé un vrai PNR européen, une base de données unique, avec échange d'information obligatoire. Mais les gouvernements réfusent catégoriquement. Le modèle défendu par le Conseil et la France ce n'est pas un PNR européen, mais 28 systèmes PNR nationaux, sans échange d'information obligatoire. C'est sur cet accord que le gouvernement français demande un vote immédiat. C'est évidemment choquant, lorsque l'on sait qu'après chaque attentat, des informations utiles et même cruciales étaitent disponibles, mais que les services des différents états membres de l'UE n'avaient pas partagé ces informations.
Le gouvernement français prétend également que la création et entrée en vigueur d'un système PNR a été retardé à cause du Parlement européen. Encore une fois: un mensonge. Le group ADLE avait proposé un Règlement, qui aurait été d'application directe. Mais les gouvernement nationaux par contre, ont préféré une Directive, qui doit d'abord être transposée en législation nationale. Cela prendra quelques années, il y aura des états membres qui ne transposeront pas ou trop tard, et il y aura de grandes divergences entre les 28 systèmes.
D'ailleurs, rien n'empêche les gouvernements de ne pas attendre et de créer leur propre système. La Commission européenne a déjà mis à disposition des états membres €56 millions à cette fin. Le gouvernement français a déjà reçu €17 millions pour la création de son propre système. Peut-être le gouvernement pourrait informer les contribuables des progrès de ce projet? Ou peut-être attend-il l'adoption d'une directive européenne pour s'assurer de la légalité de cette initiative?
En réalité le gouvernement français cherche à détourner l'attention du fait que rien ou très peu a été fait pour s'attaquer aux racines du terrorisme, que l'embrigadement continue où que ce soit, et qu'ils sont très très loin de résoudre le problème. Ce que nous avons vu en Belgique ces derniers jours c'est que tant que les terroristes continuent de bénéficier de réseaux et soutiens logistiques sur le terrain, toutes les bases de données au monde ne pourront aider à prévenir des attentats. Les auteurs des attentats de Bruxelles ont très certainement bénéficié de complicités dans les quartiers, au nez et à la barbe des service spéciaux de la police et de l'appareil de renseignement. À quoi sert-il de suivre chaque mouvement des passagers en Europe, si nous ne sommes même pas capable de suivre les mouvements de quelques personnes entre les communes de Forest et Molenbeek à Bruxelles?. D'autres villes en Belgique et en Europe ont démontré qu'une autre approche peut apporter de meilleurs résultats, comme Malines ou aux Pays-Bas par exemple. La police de proximité, le renseignement de terrain (et l'intelligence humaine), les programmes de préventions, etc, sont des outils essentiels qui sont le plus souvent négligés à l'heure des grande déclarations officielles pour l'action et l'efficacité face au terrorisme.
Utiliser les moyens modernes, y compris les données personelles, pour lutter contre le terrorisme et la criminalité? Absolument. Prétendre que l'on peut faire diversion pour ignorer les gaffes et ratés des services d'ordre et de renseignement? Pas en mon nom.